Associer en relais une céréale d’hiver avec une légumineuse implantée au printemps
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1. Présentation
Caractérisation de la technique
Description de la technique :
Principe :
Cette technique vise à implanter, dès le printemps, un couvert d’interculture semé principalement à la volée dans une céréale d’hiver ou de printemps (semis direct sous couvert végétal). L’objectif est de favoriser l’implantation du couvert à une période où les conditions sont plus favorables que lors d’une implantation à la récolte, et de maximiser ainsi les services rendus par le couvert d’interculture.
L’implantation en relais au printemps permet de limiter la compétition entre le couvert et la culture de céréales durant la phase d'association afin de garantir les performances de la culture de vente (rendement et taux de protéine). Dès la récolte de la céréale, la compétition pour la lumière est levée, ce qui permet au couvert de se développer et de valoriser le rayonnement d’été pour produire de la biomasse végétale dont des services multiples sont attendus : régulation d’adventices, fixation d’azote pour une restitution à la culture suivante (enrichir le système sol-plante), structuration du sol et autres effets agronomiques des couverts d’interculture implantés de manière plus classique. Cette pratique reste principalement utilisée en agriculture biologique.
En agriculture biologique, la technique est simple à mettre en œuvre, facilement acceptée par les agriculteurs car elle ne nécessite pas une réorganisation importante du système de culture. Elle a des avantages pour les aspects fourniture d’azote et gestion des adventices pendant l’interculture suivante (un beau couvert permet de maintenir un état de salissement satisfaisant mais ne permet pas un « nettoyage de la parcelle »). Pour les éleveurs, production de fourrage d’appoint possible à l’automne.
En agriculture conventionnelle, des problèmes de mise en œuvre peuvent être rencontrés, nécessitant d’adapter les itinéraires techniques :
- Couvert de céréale trop dense, ne laisse pas passer de lumière : concurrence trop forte avec le couvert lors de l’implantation de celui-ci.
- Suspicion de phytotoxicité rémanente sur les légumineuses causées par les herbicides utilisés sur la céréale ou sur le précédent (sulfonylurée, …)
- L’apport précoce d’ammonitrate sur céréale freine le développement de la légumineuse et augmente la compétitivité due la céréale
- Matériel de désherbage mécanique pas toujours disponible sur l’exploitation en conventionnelle (herse étrille, …)
- Concurrence couvert/culture pouvant entrainer une diminution de rendement sur la culture de vente
Un ensemble de causes qui expliquent des échecs d’établissement de la légumineuse dans des itinéraires conventionnels.
Conditions de réussite :
La situation est favorable lorsque la culture de céréale laisse encore passer du rayonnement au printemps : densité de semis faible, variété à faible tallage, pratique de désherbage mécanique au début du printemps et lorsque la situation est non limitante en eau au printemps (attention sur sols superficiels).
Le système de relay-cropping doit être réfléchi dès le semis de la céréale en anticipant bien toutes les interventions futures (semis de la culture d’été, désherbage non rémanent pour la culture relai, récolte de la céréale…).
Même si sur le principe, cette technique pourrait convenir à toutes les céréales, elle est aujourd'hui principalement utilisée sur blé.
Précision sur la technique :
- Choix des espèces
Les espèces associées appartiennent, le plus souvent, à la famille des légumineuses fourragères pérennes. Exemples d’espèces implantées en relais dans le blé d’hiver :
- Trèfle violet (20 kg/ha)
- Trèfle blanc (6 kg/ha)
- Minette (25 kg/ha)
- Luzerne (25 kg/ha)
- Implantation
La légumineuse est généralement implantée au stade montaison de la céréale à la volée lors du dernier passage d’outil de désherbage mécanique (bineuse, herse étrille) afin de favoriser le contact terre-graine.
- Destruction
A l’hiver ou au printemps suivant, la légumineuse fourragère pourra être récoltée ou retournée au sol (avant une culture de printemps, ne pas détruire le couvert avant décembre pour éviter tout risque de lixiviation précoce des nitrates).
Période de mise en œuvre
La technique permet de semer le couvert d'interculture dans la céréale.
Echelle spatiale de mise en œuvre
Application de la technique à...
Toutes les productions : Facilement généralisableLa technique est facilement généralisable à toutes les céréales à paille. Des associations de légumineuses au blé d’hiver à d’autres périodes sont en expérimentation : semis de la légumineuse en même temps que le blé à l’automne, semis du blé dans un couvert permanent (ex. luzerne ou trèfle blanc).
Tous les types de sols : Généralisation parfois délicate
Cette pratique peut s'appliquer à beaucoup de types de sols. Attention toutefois aux situations de sol séchant, où l’eau peut être limitante pour l’établissement de la légumineuse.
Adapter le choix de l’espèce (et la variété) aux caractéristiques du sol (ex. la luzerne n’aime pas les sols acides, pH < 6).
Tous les contextes climatiques : Généralisation parfois délicate
Attention aux situations à fort risque de stress hydrique, faibles précipitations au printemps. Par la suite, la production de biomasse pendant l’interculture peut être limitée en conditions sèches.
Adapter le choix de l’espèce (et la variété) au contexte climatique. Pratique étudiée en région Auvergne-Rhône-Alpes depuis 2011.
Réglementation
Attention dans les zones à enjeux eau, où les couverts d’interculture constitués uniquement de légumineuses sont interdits. Dans ces situations, il peut être envisagé de réaliser un sur-semis d’une autre espèce non-légumineuse à la récolte de la céréale.
Ne pas détruire le couvert avant décembre pour éviter tout risque de lixiviation rapide des nitrates.
2. Services rendus par la technique
Régulation et gestion des adventices
Stabilité physique et structuration du sol
Fourniture de nutriments
3. Effets sur la durabilité du système de culture
Critères "environnementaux"
Effet sur la qualité de l'air : VariableLa culture en relai permet de réduire les traitements phytosanitaires, et donc de limiter les transferts vers l'air par vaporisation de matières actives. Reste à vérifier dans les pratiques si les effets des couverts permettent de réduire l’usage des traitements (les cas étudiés sont essentiellement en agriculture biologique).
Effet sur la qualité de l'eau : Variable
L’association d’une légumineuse en relais dans le blé permet de limiter la perte d’éléments nutritifs en hiver par leur mobilisation dans la biomasse de légumineuses pendant l’automne. Cependant, une destruction précoce du couvert à l’automne augmentera les risques de lixiviation des éléments pendant l’hiver. Cette pratique sécurise l’implantation du couvert d’interculture par rapport à un semis à la récolte du blé. Avec un couvert mieux réussi, les pertes par lixiviation sont mieux maîtrisées. La valorisation des nutriments par restitution à la culture suivante permet des économies d’engrais et potentiellement des transferts polluants liés à leur sur-dosage possible.
Effet sur la consommation de ressources fossiles : Variable
La mutualisation des opérations de semis du couvert et de désherbage mécanique au printemps permet d’éviter un passage supplémentaire pour le semis du couvert à l’été, donc la consommation de fuel et les émissions de gaz à effet de serre liés à l’utilisation du tracteur. Les économies d’engrais azotés possibles sur la culture suivante permettent de réduire la consommation d’énergie fossile liée à la fabrication et au transport des engrais et de GES liées à la fabrication et au transport des engrais.
Un point de vigilance : les émissions de GES liées à la dégradation de résidus de cultures légumineuses (N20 par exemple) sont encore mal estimées.
Critères "agronomiques"
Productivité : Pas d'effet (neutre)Le décalage de date de semis entre la légumineuse et le blé permet de limiter les effets de compétition exercés par la légumineuse sur le blé.
Avec une implantation de couvert sécurisée, la production de biomasse globale du système est accrue, et les effets bénéfiques des couverts « engrais-verts » peuvent lever certains facteurs limitants la productivité du système notamment en agriculture biologique (compétition des adventices, nutrition limitée par l’azote).
Qualité de la production : Variable
En agriculture biologique, un développement trop important de la légumineuse n’impacte pas le rendement du blé mais peut toutefois causer une baisse sensible du taux de protéine sur le blé, pour les espèces qui supportaient le mieux la compétition du blé (luzerne, minette) (thèse de Camille Amossé).
En agriculture conventionnelle, pas de connaissances sur ces impacts.
Fertilité du sol : En augmentation
L'implantation d'un couvert de légumineuses conduit à augmenter le stock d’azote du système sol-plante à l’échelle du système de culture.
Les effets « engrais verts » du couvert contribuent à la protection du sol, à sa structuration, etc. et donc à la préservation de la fertilité du sol.
Stress hydrique : Variable
En cas de printemps secs et de sol séchant, malgré son avance de développement, le blé pourra subir une compétition du couvert pour l’eau si l’espèce associée s’installe bien et est très poussante. Un couvert très développé contribuera à épuiser le stock d’eau disponible dans le sol, avec une conséquence possible sur le taux de protéine ou le rendement de la céréale.
Inversement, étant en phase d’établissement, le couvert sera sensible à la compétition exercée par le blé pour l’eau au printemps.
Biodiversité fonctionnelle : En augmentation
La diversification et la couverture du sol après la récolte du blé pourrait avoir un effet positif sur le développement des auxiliaires des cultures et la biodiversité fonctionnelle.
Autres critères agronomiques : Variable
Sur les maladies, l’association du couvert pourrait avoir des effets :
- tantôt positifs : réduction du risque « maladies » car diversification des cultures « effet plante associé »
- tantôt négatifs : développement possible de certaines maladies (ex. aphanomyces, sclérotinia) avec des plantes de service « légumineuses » susceptibles d’être hôte de ces maladies.
Critères "économiques"
Charges opérationnelles : Variable
L’investissement lié à l’achat de semences de légumineuses doit être largement compensé par les économies liées à l’azote sur la culture suivante. Un investissement supérieur aurait de toute façon du être réalisé dans le cas d’une interculture longue, avec l’achat de semences d’autres couverts probablement plus chers que les semences de trèfles par exemple.
Charges de mécanisation : Variable
L’opération de semis n’a pas de surcout si elle est mutualisée avec une opération de désherbage mécanique.
L’opération de destruction du couvert n’est pas strictement liée à cette pratique, mais à toute pratique de couverture du sol pendant l’interculture.
Marge : Variable
Légère augmentation des charges sur la culture en cours avec l’achat de semences de légumineuses, mais baisse sur l'interculture car le couvert est déjà implanté.
Diminution de la marge si impact sur le rendement ou sur la qualité du grain (taux de protéines).
Réduction des charges d’engrais sur la culture suivante.
Critères "sociaux"
Temps de travail : Variable
Pas d’effet si opération mutualisée avec un désherbage mécanique (sauf temps de préparation du matériel de semis).
Temps d'observation : Cette pratique constitue une pratique innovante nécessitant apprentissage et observations.
Période de pointe : En diminution
Semis du couvert d'interculture au printemps plutôt qu'en été pendant les moissons.
4. Organismes favorisés ou défavorisés
Bioagresseurs favorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
---|---|---|---|
aphanomyces | agent pathogène (bioagresseur) | Attention à choisir des espèces peu sensibles et non-hôtes de maladies touchant les autres espèces cultivées dans la rotation : ex. aphanomyces si pois dans rotation... | |
limace | ravageur, prédateur ou parasite | Effet de la présence d’un couvert végétal en fin d’hiver. Pas de mesures pour confirmer /suspicion et effet négatif possible sur l’implantation du couvert | |
sclérotinia | agent pathogène (bioagresseur) | Attention à choisir des espèces peu sensibles et non-hôtes de maladies touchant les autres espèces cultivées dans la rotation : ex. sclérotinia si colza dans rotation |
Bioagresseurs défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
---|---|---|---|
adventices | MOYENNE | adventices | Suppression des adventices susceptibles de se développer dans le système pendant l’interculture (efficacité moyenne si technique utilisée seule, à combiner) |
Auxiliaires favorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
---|---|---|---|
Carabes prédateurs et granivores | FAIBLE | Ennemis naturels des bioagresseurs | La présence d’une couverture végétale favorise les populations d’insectes marcheurs |
Pollinisateurs | MOYENNE | Pollinisateurs | A condition que le couvert fleurisse avant sa destruction |
Auxiliaires défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
---|
Accidents climatiques et physiologiques favorisés
Organisme | Impact de la technique | Précisions |
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Accidents climatiques et physiologiques défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Précisions |
---|
5. Pour en savoir plus
6. Mots clés
Méthode de contrôle des bioagresseurs : Contrôle cultural
Mode d'action : Atténuation
Type de stratégie vis-à-vis de l'utilisation de pesticides : Substitution Reconception
Contributeurs
charge-mission - celine.bourlet@pl.chambagri.fr