Lutte par occultation contre les adventices en productions légumières
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1. Présentation
Caractérisation de la technique
Description de la technique :
Cette fiche a été créée en 2021 par le Groupe Technique Adventices du GIS PICLég.
Principe
Le désherbage par occultation est une technique de lutte contre les adventices qui consiste en la mise en place sur le sol d’un film opaque. Il entraîne une augmentation modérée de la température du sol, favorable à la germination des graines d’adventices (en avance par rapport aux conditions climatiques), et la destruction des plantules ainsi formées, par absence de lumière. Ce dispositif a ainsi pour vocation d’épuiser le stock semencier, en étant appliqué sur une période restreinte, avant la mise en culture.
Conditions de mise en oeuvre
Préparation du sol
Le sol doit être travaillé de la même manière que pour un semis ou une plantation. Pour une bonne levée des adventices, il est nécessaire d’obtenir un lit de semence le plus régulier possible, avec une structure grumeleuse. Il est conseillé d’éviter un travail trop profond succeptible de retourner le sol (labour, rotobêche), afin de conserver un maximum de semences dans les strates superficielles. Un premier passage avec un outil à dents (cultivateur, cultibutte, actisol…) peut ainsi être réalisé, suivi d’un passage plus superficiel (cultirateau, rotovator, vibroculteur…). Attention toutefois à ne pas réaliser une préparation trop fine, car le sol pourrait ensuite souffrir d’une compaction sous le poids de la bâche. La préparation de planches ou de buttes doit également être effectuée à ce moment.
Une fois le sol travaillé, un tour d’irrigation est conseillée afin de conserver une humidité suffisante à la germination des graines d’adventices tout le long de l’occultation.
Choix du film
Les films plastiques utilisés peuvent être de différents types et posséder des caractéristiques différentes, notamment en ce qui concerne :
- la praticité de mise en place (variable selon le poids, la largeur, la solidité du matériau) ;
- la perméabilité (qui peut impacter le dessèchement du sol ou conduire à des excès d’humidité) ;
- l’efficacité contre l’enherbement (variable selon l’efficacité du réchauffement du sol et la solidité du matériau) ;
- la durée de vie (possible de réutiliser ou non le matériau).
Le choix du matériau utilisé dépend donc de ces critères, mais aussi des paramètre propres au contexte d’utilisation :
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la saison (besoin d’un effet thermique plus ou moins élevé) ;
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le type de sol (sensibilité à la compaction, la prise en masse ou au dessèchement) ;
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les conditions de pose (disponibilité de main d’oeuvre ou de matériel pour le déroulage, dispositifs d’ancrage au sol).
Le tableau ci-dessous récapitule les avantages et inconvénients de quelques matériaux :
Matériaux | Avantages | Inconvénients |
Toile plastique tissée |
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Films polyéthylène de couleurs foncées |
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Bâche d’ensilage |
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Mise en place du film
Selon le matériau utilisé, le film peut être posé manuellement ou mécaniquement, à l’aide d’une dérouleuse. Il doit ensuite être lesté sur les bords, à l’aide de terre, d’agrafes ou de poids.
Durée de mise en place et saison :
La durée de l’occultation est variable selon les objectifs de désherbage souhaités, la saison de mise en place (plus elle est précoce, plus la durée est longue) et la date d’implantation prévue pour la culture suivante. Ainsi, pour une mise en place :
- De janvier à mars, prévoir 8 semaines d’occultation
- D’avril à mi-mai, 5 à 6 semaines d’occultation
- De mi-mai à mi-septembre : 4 semaines d’occultation
- De septembre à décembre : occultation longue jusqu’en mars-avril pour un semis précoce.
L’efficacité de l’occultation sera maximale entre avril et août. Elle sera au contraire plus limitée de janvier à mars et nécessitera un film ayant un bon effet thermique. De plus, pour des implantations en automne / hiver, une vigilance accrue face à la prise en masse du sol devra être de mise.
Fin de l’occultation
Une fois la durée d’occultation recommandée atteinte, la bâche plastique peut être retirée. Un temps de ressuyage peut être nécessaire en fonction de l’humidité du sol. Si un travail du sol est nécessaire avant l’implantation de la culture, celui-ci doit être le plus superficiel possible (3-5 cm, utilisation possible d’une herse étrille ou d’une décrouteuse) afin d’éviter la remontée des graines d’adventices enfouies plus en profondeur et non détruites par l’occultation.
Il est également possible de repositionner la bâche d’occultation en post-semis / pré-levée, afin d’accélérer et homogénéiser la levée de la culture. Attention, toutefois ceci nécessite une surveillance étroite, afin de retirer la bâche au bon moment, au tout début de la levée (voir exemple de mise en œuvre ci-dessous).
Pour finir, si le plastique utilisé n’est pas réutilisable, son recyclage doit être prévu, via une filière agréée (voir consignes de tri de l’ADIVALOR).
Efficacité contre les adventices
Le désherbage par occultation a une bonne efficacité contre la plupart des adventices annuelles, en diminuant leurs stocks semenciers. Des expériences ont ainsi montré un effet net sur l’enherbement pendant plusieurs mois après l’occultation (Infos CTIFL, 2010). Elle est par contre inefficace contre les vivaces qui ont la capacité de survivre et repartir une fois le bâchage retiré.
Exemples de mise en œuvre
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Occultation de 1 mois ou 5 mois avant plantation de salade en avril
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Occultation de 1 à 2 mois avant semis de carotte en mai. Pour plus de détails, voir Infos CTIFL, 2010.
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Occultation de 2 mois avant semis de carotte en juin, puis occultation de 4 jours en post-semis / pré-levée pour accélérer la germination de la culture (très bonne efficacité contre l’enherbement, augmentation de la facilité de désherbage, augmentation du rendement). Pour plus de détails, voir Pôle Maraîchage de l’EPLEFPA Les Sillons de Haute Alsace, 2014.
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Comparaison de l’efficacité de différentes durées et modalités d’occultation avant culture de carotte (SERAIL et CTIFL, 2009, 2011).
Précision sur la technique :
La technique de l’occultation est à distinguer de la solarisation, qui est, elle, une technique de désinfection thermique du sol, efficace contre tous les bioagresseurs du sol (pas seulement les adventices), et qui est réalisée à l’aide d’une bâche transparente qui concentre le rayonnement solaire.
Ces deux techniques peuvent toutefois être complémentaires. Avant une culture précoce implantée en sortie d’hiver (poireau ou carotte par exemple), il est ainsi possible de réaliser une solarisation en août-septembre, lorsque l’ensoleillement est encore suffisamment important, puis de poursuivre par une occultation jusqu’en fin d’hiver, afin de garder la parcelle propre.
Période de mise en œuvre
Cette technique peut être mise en place lors de différentes périodes d’interculture tout au long de l’année. Elle nécessite donc de libérer et bloquer une parcelle pendant plusieurs semaines.
Echelle spatiale de mise en œuvre
Cette technique est applicable à l’échelle d’une parcelle entière. Les surfaces concernées restent toutefois limitées étant donné le coût et le temps de travail nécessaire à sa mise en place.
Application de la technique à...
Toutes les productions : Facilement généralisableCette technique pouvant être mise en place à plusieurs périodes de l’année, elle est applicable avant toutes cultures légumières, qu’il s’agisse de cultures semées, plantées, de bulbes, de pépinières, de cultures d’hiver, de printemps ou d’été.
Tous les types de sols : Facilement généralisable
Cette technique est facilement généralisable à tous les sols. Attention toutefois aux sols sensibles à la prise en masse et au tassement. Il peut en effet arriver que la structure du sol soit dégradée sous l’effet du poids de la bâche plastique et de l’humidité importante.
Tous les contextes climatiques : Facilement généralisable
Cette technique peut être appliquée à tous les contextes climatiques. Il est seulement nécessaire d’avoir un sol suffisamment ressuyé avant la mise en place du bâchage, pour le travailler dans de bonnes conditions.
Réglementation
Les paillages plastiques suivent la réglementation générale sur les déchets pour leur recyclage. Leur brûlage et leur enfouissement sauvage sont ainsi interdits. Ils doivent être collectés par ADIVALOR pour être recyclés, ou à défaut soumis à une valorisation énergétique. Certaines consignes de propreté et de tri sont ainsi à respecter pour le recyclage de ces plastiques.
2. Services rendus par la technique
Régulation et gestion des adventices
3. Effets sur la durabilité du système de culture
Critères "environnementaux"
Effet sur la qualité de l'air : En augmentationIl y a une diminution des transferts de polluants vers l'air grâce à la réduction des herbicides utilisés.
Effet sur la qualité de l'eau : En augmentation
Il y a une diminution des transferts de polluants vers l’eau grâce à la réduction des herbicides utilisés.
Effet sur la consommation de ressources fossiles : Variable
L'effet global est difficile à évaluer et est variable. D’un côté, il y a une réduction de la consommation de carburant et d’énergie si l’occultation remplace des traitements herbicides ou des interventions mécaniques, mais d'autre part il y a également une augmentation de la consommation en ressources fossiles via la fabrication et la mise en place des films plastiques.
Quantité de déchet : En augmentation
Il y a une augmentation de la quantité de déchets qui doivent être traités après usage, en particulier dans le cas d'utilisation de matières plastiques non réutilisables.
Critères "agronomiques"
Productivité : En augmentationL'augmentation du rendement est possible grâce à la diminution sensible de l’enherbement au cours des mois suivants l’occultation.
Qualité de la production : Pas d'effet (neutre)
Fertilité du sol : Variable
En général l’occultation n’a pas d’effet notable sur la qualité du sol. Selon ses caractéristiques, il peut toutefois arriver que le sol subisse un tassement et une prise en masse sous l’effet de l’humidité importante et du poids du bâchage. Cette compaction peut ainsi être dommageable pour la culture suivante.
Stress hydrique : Pas d'effet (neutre)
Biodiversité fonctionnelle : Pas de connaissance sur impact
Effets thermiques sur la précocité : Variable
Il peut y avoir une augmentation de la précocité des cultures si le bâchage est repositionné quelques jours en post-semis / pré-levée (effet thermique positif sur la germination).
Critères "économiques"
Charges opérationnelles : Variable
Il y a une écconomie de main d’oeuvre (arrachage des herbes), de traitements ou de charges de mécanisation (désherbage mécanique) ;
L'investissement initial nécessaire va de 0,08 à 1,10 €/m² (2014) en fonction de l’épaisseur et du type de plastique utilisé. Cet investissement peut toutefois être amorti sur plusieurs années si le plastique est réutilisable.
Le financement de la filière de recyclage mise en place par ADIVALOR est également à supporter. Elle est financée par deux moyens (source CPA) :
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une éco-contribution à la source qui s’élève à 240 €/t plastique neuf (2020) pour les films de paillage,
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des frais de reprise qui s’élèvent à 145 €/t de film agricole usagé (FAU) pour les paillages lorsque le taux de souillure est supérieur à 50 % (2020).
Une bonification est également possible et restituée pour les FAU dont le taux de souillure est inférieur à ce taux : 95 €/t pour les plastiques clairs (C1), 50 €/t pour les plastiques de couleur (F) (2020)
Marge : Variable
Il y a une économie de charges pour le désherbage, mais avec un achat nécessaire de films plastiques, faisant constater une possible petite augmentation de la marge, mais qui n'est pas systématiquement.
Critères "sociaux"
Temps de travail : Variable
L’effet sur le temps de travail global est variable. La pose du plastique peut prendre un temps non négligeable dans le cas d’une pose manuelle, mais peut-être beaucoup plus rapide en cas de mécanisation.
L’occultation permet toutefois également des gains de temps sur les opérations de désherbage au cours des mois qui suivent, ce qui compense le surplus de travail lié à sa mise en place.
4. Organismes favorisés ou défavorisés
Bioagresseurs favorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
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rhizoctone brun | MOYENNE | agent pathogène (bioagresseur) | Certaines espèces de champignons peuvent être favorisés par le microclimat créé par le film plastique (rhizoctonia par exemple) |
rongeur | MOYENNE | ravageur, prédateur ou parasite | Les films plastiques peuvent former une protection qui favorise les rongeurs tels que les campagnols. |
Bioagresseurs défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
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Adventices annuelles | FORTE | adventices | Germination des graines d’adventices et destruction des plantules par absence de lumière. |
vivaces | FAIBLE | adventices | Les vivaces sont généralement capables de survivre ou de repartir à l’issue de l’occultation. Le liseron, le chardon, le rumex sont peu sensibles. Le chiendent est par contre très sensible à une occultation estivale de 3 à 4 mois. De manière générale, plus la durée d’occultation est longue et plus elle est efficace sur les vivaces. |
Auxiliaires favorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
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Auxiliaires défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
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Accidents climatiques et physiologiques favorisés
Organisme | Impact de la technique | Précisions |
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Accidents climatiques et physiologiques défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Précisions |
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5. Pour en savoir plus
6. Mots clés
Méthode de contrôle des bioagresseurs : Lutte physique
Mode d'action : Action sur le stock initial
Type de stratégie vis-à-vis de l'utilisation de pesticides : Substitution