Lutter contre les adventices avec les plantes de services en horticulture et en PPAM
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1. Présentation
Caractérisation de la technique
Description de la technique :
Cette technique consiste à implanter des plantes de services ayant pour but de réguler la germination et le développement de la flore adventice présente sur la parcelle. On désigne par plantes de services les espèces implantées avant ou pendant une culture principale, dans la parcelle ou à proximité et qui sont destinées à fournir un ou plusieurs avantages (services écosystémiques) à la culture en place ou aux suivantes dans la rotation. Au-delà de réguler la flore adventice, les plantes de services peuvent également réguler d’autres bioagresseurs (ravageurs et maladies), améliorer la structure et la stabilité du sol, le cycle des éléments nutritifs, ainsi que réguler le climat (stockage du carbone).
Principe :
La mise en place de plantes de services permet de modifier les communautés adventices (structure, dynamique) présentes sur la parcelle par plusieurs mécanismes, soit :
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Par compétition pour les ressources (eau, éléments nutritifs, lumière) et l’espace, ce qui provoque un phénomène d’ « étouffement » des adventices par le couvert lorsqu’il se développe plus rapidement (RGR, Relative Growth Rate). Cette fonction dépend aussi d'autres traits caractéristiques comme la hauteur des plantes, le port, la surface foliaire, etc. Les plantes de services détruites et laissées en surface peuvent former une barrière physique limitant la levée des adventices si le mulch est suffisamment épais (cas des paillages de sorgho).
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Par effet allélopathique induit par les exsudats racinaires ou foliaires pendant le cycle des plantes ou leur décomposition sur le sol, qui vont limiter la germination et la croissance des adventices (Gfeller et Wirth, 2017).
Les deux effets, compétition pour les ressources et allélopathie, se manifestent dans le sol et sont donc difficiles à isoler. Ces effets agissent également sur la culture. Pour limiter l'effet négatif, les couverts sont souvent implantés avant la culture principale.
Parfois, il est possible d’implanter un couvert végétal annuel ou semi-permanent en association à la culture principale afin d’exercer une pression de sélection sur la flore adventice présente sur la parcelle. C’est souvent le cas pour les cultures pérennes.
Cette technique est utilisée pour limiter le salissement de la parcelle et donc le recours aux herbicides.
Conditions de réussite :
Si le principal objectif est la gestion des adventices, les plantes de services doivent être choisies et gérées (composition du couvert, croissance vigoureuse, biomasse produite, pouvoir couvrant et temps de présence sur la parcelle) de manière à entrer en concurrence avec les adventices présentes ou leur germination tout en limitant la compétition avec la culture présente et limiter les pertes de rendements associées. La plante de services induit dans ce cas des modifications du milieu dans un sens favorable pour la culture c’est-à-dire une facilitation tout en garantissant une forte compétitivité avec la flore adventice. Obtenir ces conditions est difficile et peu de systèmes y parviennent. L'utilisation des plantes de service en précédent cultural ou en zone non cultivée est pour l’instant souvent le meilleur compromis.
Le choix des espèces doit également intégrer les caractéristiques locales du sol, du climat, voire du microclimat, pour s’assurer que les plantes semées s’implantent correctement. Certains producteurs qui en ont la possibilité irriguent leurs couverts annuels, afin d’assurer leur levée.
Précision sur la technique :
En horticulture, des plantes assainissantes telles que les œillets d’inde peuvent être implantées avant une culture de rosiers afin de lutter contre la flore adventice Non, c’est contre les nématodes. Bécart et Coutant (2018) donnent quelques pistes sur les plantes de services couvre-sols occupant des surfaces non-cultivées et la valorisation des effets allélopathiques (ex. Vinca major ssp. hirsuta, Thymus longicaulis, …). Hebbinckuys (2020) a identifié Phuopsis stylosa, Tripleurospermum caucasicum, Achillea crithmifolia comme des espèces particulièrement résistantes et allélopathiques.
En PPAM, un couvert annuel ou semi-permanent peuvent être mis en place.
Points de vigilance :
L’irrigation étant très peu présente en culture de lavandin, il est nécessaire d’adapter la date de semis des couverts aux pluies potentielles en fin d’été pour ne pas pénaliser leur développement. Une attention particulière doit être apportée aux mélanges de semences ayant des tailles différentes, il vaut mieux privilégier les graines qui vont se semer à des profondeurs comparables. Il est déconseillé de semer le couvert trop près des rangs de lavande pour éviter les risques de trop forte concurrence. Tout comme la flore spontané, un couvert mal maîtrisé peut, par compétition, fortement pénaliser le rendement de la parcelle et ainsi en annuler une bonne partie des effets bénéfiques. Attention notamment aux risques de concurrence dans le cas de couverts ayant la même exploration spatiale racinaire que le lavandin. Il est préférable de fertiliser seulement sur le rang de la lavande ou du lavandin et éviter la fertilisation du couvert pour se protéger d’un effet concurrentiel vis-à-vis de la Ppam. Il est préconisé de maîtriser la largeur du couvert (pas plus de 60 cm ou un tiers de la largeur du rang) et sa régulation pour éviter la concurrence sur le rang de lavande. Le matériel n’est pas encore nécessairement adapté pour la gestion mécanique, il existe un manque de recul quant à la stratégie de régulation la plus adaptée et des difficultés dans la destruction des couverts. En cas d’implantation de la PPAM dans un couvert en place, la technique nécessite un matériel adapté pour désherber le rang ou travailler le sol en strip-till.
Quelques actions, projets, programmes :
Le projet RECITAL avait pour objectif d’augmenter la résilience des cultures aux climats et bio-agresseurs et permettre une gestion durable des adventices dans les lavanderaies.
Le PEI « Gestion des couverts végétaux sans herbicide en production de grandes cultures et plantes à parfums aromatiques et médicinales en PACA » avait pour objectif de permettre à l’agriculture locale de contribuer à l’atténuation du changement climatique en construisant des systèmes de culture résilients et durables en agriculture biologique ou à bas niveaux d’intrants, en favorisant une montée en compétence collective agronomique et mécanique.
Le projet PlacoHb avait pour objectif de contrôler les adventices et promouvoir la biodiversité avec les plantes couvres-sol.
Le projet Hortipepi2 a notamment pour objectif de réguler les bioagresseurs en pépinières avec une combinaison de leviers comprenant les plantes de services.
Période de mise en œuvre
Les plantes de services peuvent être implantées pendant la période d'interculture, pour éviter le salissement pendant cette période ou en même temps que la Ppam, le plus souvent pour gérer les adventices pendant la levée de cette dernière ou pour les cultures à grand écartement.
Echelle spatiale de mise en œuvre
Les plantes de services peuvent permettre de modifier ou diminuer les communautés d’adventices présentes sur la parcelle.
Application de la technique à...
Toutes les productions : Facilement généralisableSelon la rotation, il est possible d’implanter des plantes de services pendant les intercultures courtes ou longues pour gérer les adventices. Les associations de plantes de services avec la culture principale sont possibles pour les cultures présentant une levée assez lente ou à grand écartement pour gérer le salissement mais sont peu intéressantes sur des cultures semées plus denses et déjà assez compétitives.
Tous les types de sols : Facilement généralisable
Le levier est applicable pour tous les types de sols. Suivant les conditions pédologiques et le matériel végétal, on peut adapter l’enherbement en modulant la surface enherbée, de chaque inter-rang par exemple à un rang sur deux afin d’éviter les stress hydriques, ainsi que la date de destruction.
Tous les contextes climatiques : Généralisation parfois délicate
Le choix des espèces à implanter en même temps que la culture de rente ou en interculture sont bien évidemment à adapter selon le climat. Le développement de la flore spontanée, s’adaptant au climat local, peut dans certaines situations être favorisée à l’implantation de couverts végétaux.
Réglementation
Concernant la réglementation liée à la directive nitrates, référez-vous à la Draaf de votre région.
2. Services rendus par la technique
Régulation et gestion des adventices
3. Effets sur la durabilité du système de culture
Critères "environnementaux"
Effet sur la qualité de l'air : En augmentationPar rapport à un sol nu, les plantes de services peuvent permettre de diminuer l’utilisation des herbicides si la destruction des couverts n’est pas réalisée chimiquement.
Effet sur la qualité de l'eau : En augmentation
Par rapport à un sol nu, les plantes de services peuvent permettre de diminuer l’utilisation des herbicides si la destruction des couverts n’est pas réalisée chimiquement. Elles permettent aussi de diminuer l’utilisation d'engrais et limiter le transfert des produits phytosanitaires ainsi que le lessivage/la lixiviation des éléments nutritifs vers les nappes d’eau souterraines en hiver par les pluies.
Effet sur la consommation de ressources fossiles : Variable
Ce critère dépend de la technique, de sa conduite et du nombre de passages dans la parcelle (travail du sol, implantation, entretien, destruction) par rapport aux passages de produits phytosanitaires.
Stockage de carbone : En augmentation
Les plantes de services permettent de stocker du carbone et donc de limiter les émissions de gaz à effet de serre vers l'atmosphère.
Critères "agronomiques"
Productivité : VariableL’effet observable varie selon la technique mise en place. Les plantes de services implantées sur l’inter-rang permettent de lisser les rendements.
Il est conseillé de ne pas enherber la totalité de l’inter-rang en lavanderaies pour ne pas nuire aux rendements. En effet, des essais ont montré que réduire la largeur du couvert végétal de 45% à 25% permettrait de maintenir voire plus que doubler le rendement en huiles essentielles (de 117%) qui est de +70% dans les modalités ayant un couvert végétal un inter-rang sur deux (Debregeas, 2017) par rapport au témoin.
Qualité de la production : Pas de connaissance sur impact
Fertilité du sol : Variable
D’une manière générale, les plantes de services améliorent les composantes physiques (diminution du ruissellement, de la battance et de l’érosion) et biologiques (amélioration de la vie du sol et de la teneur en matière organique) de la fertilité du sol. La composante chimiques (amélioration de la disponibilité des éléments nutritifs dans certains cas, diminution de la lixiviation) n'est pas toujours améliorée avec la concurence engendrée par le couvert. Sa décomposition permet d’augmenter les teneurs en matière organique du sol et en azote dans le cas de certaines plantes.
Stress hydrique : Variable
Selon le type de sol, les conditions climatiques et la nature des espèces implantées, les plantes de services peuvent induire une concurrence hydrique au sein de la parcelle. Lamacque (2020) a montré dans le cadre de sa thèse qu’un couvert végétal sur l’inter-rang de lavandin exerce une contrainte hydrique pendant la période de croissance et de sécheresse estivale. Le stress hydrique serait plus précoce avec le couvert mais l’intensité de la sécheresse identique à la culture avec un sol nu en inter-rang.
Biodiversité fonctionnelle : En augmentation
L’insertion de nouvelles familles de plantes dans le système apporte de la diversité. Par rapport à un sol nu, les plantes de services permettent d'apporter abri et nourriture aux animaux sauvages (oiseaux, petit gibier, ...), auxiliaires ennemis des ravageurs, pollinisateurs ainsi qu'aux organismes du sol (biomasse microbienne, vers de terre, ...).
Critères "économiques"
Charges opérationnelles : En augmentation
Par rapport à un sol nu, les plantes de services apportent des éléments fertilisants et protègent généralement les cultures associées ou suivantes des bioagresseurs ce qui permet de réduire les coûts relatifs aux intrants chimiques. Toutefois, elles demandent plus d'eau. La provenance des semences est un facteur clé de la diminution des coûts : fermières pour des coûts modérés, de semenciers plus élevés.
Charges de mécanisation : Variable
La mise en place de plantes de services peut nécessiter l’investissement dans du nouveau matériel (semoir, matériel de désherbage mécanique, ...). L’implantation de la PPAM dans un couvert en place nécessite un matériel adapté pour désherber le rang ou travailler le sol en strip-till. Certains producteurs auto-construisent leur matériel adapté aux passages dans leurs parcelles ce qui limite fortement les coûts.
Marge : Variable
Les brebis peuvent venir pâturer les couverts sur l’inter-rang à l’automne pour gérer le couvert. Il est possible de récolter les plantes de services cultivées en interculture en dérobées fourragères, à ensiler, récolter en grains ou à vocation énergétique. La valorisation n'est toutefois pas l'objectif premier des plantes de services.
Critères "sociaux"
Temps de travail : En diminution
Pour Yann Sauvaire, lorsque tout est en place, lorsque les solution techniques et mécaniques sont trouvés et les outils adaptés, la technique est un gain de temps.
Les temps de travaux liés à l’augmentation du nombre de passages (préparation du sol, semis, entretien, destruction) sont plus importants qu'au désherbage chimique. Toutefois, le temps de travail ne sera pas forcément augmenté si le système est conçu dès l'implantation pour supporter la concurrence, et que la stratégie consiste à laisser les couverts s'équilibrer.
Effet sur la santé de l'agriculteur : En augmentation
Par diminution de l’usage d’herbicides et de produits phytosanitaires dans leur ensemble.
Paysage : En augmentation
Les plantes de services contribuent à améliorer les paysages et permettent de communiquer positivement.
4. Organismes favorisés ou défavorisés
Bioagresseurs favorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
---|
Bioagresseurs défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
---|---|---|---|
Chenille | MOYENNE | ravageur, prédateur ou parasite | |
Cicadelles | MOYENNE | ravageur, prédateur ou parasite | Si mélange avec graminée, alors en augmentation (cas des vigne) |
Cécidomyies | MOYENNE | ravageur, prédateur ou parasite | |
adventices | MOYENNE | adventices | |
aleurodes | MOYENNE | ravageur, prédateur ou parasite | |
nématode (bioagresseur) | MOYENNE | ravageur, prédateur ou parasite | |
puceron | MOYENNE | ravageur, prédateur ou parasite |
Auxiliaires favorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
---|---|---|---|
Bactéries fonctionnelles du sol | MOYENNE | Organismes fonctionnels du sol | |
Chrysopes et hémérobes | MOYENNE | Ennemis naturels des bioagresseurs | |
Pollinisateurs | MOYENNE | Pollinisateurs | |
Syrphes et autres mouches | MOYENNE | Pollinisateurs | Mouches tachinaires |
Syrphes prédatrices | MOYENNE | Ennemis naturels des bioagresseurs | |
Vers de terre | MOYENNE | Organismes fonctionnels du sol |
Auxiliaires défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Type | Précisions |
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Accidents climatiques et physiologiques favorisés
Organisme | Impact de la technique | Précisions |
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Accidents climatiques et physiologiques défavorisés
Organisme | Impact de la technique | Précisions |
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5. Pour en savoir plus
6. Mots clés
Méthode de contrôle des bioagresseurs : Lutte biologique
Mode d'action : Action sur le stock initial
Type de stratégie vis-à-vis de l'utilisation de pesticides : Reconception