PILOTER LA RESSOURCE ALIMENTAIRE DU CHEPTEL

 

 

Dans les élevages et fermes de polyculture-élevage, le changement climatique a divers impacts sur la production et la disponibilité en aliments (herbe, fourrages, concentrés). Ces impacts diffèrent selon les régions, car certaines vont bénéficier d'une hausse de production des prairies et des cultures, tandis que les régions plus continentales et méditerranéennes sont touchées plus fréquemment par le déficit hydrique et les vagues de chaleur.

 

Le cas particulier de l'adaptation des élevages en zone de montagne a fait l’objet d’un projet LIFE franco-italien Pastoralp. Ce projet a mené à la construction d’un outil d’aide à la décision sur les leviers d’adaptation des pratiques de pastoralisme. Une méthode de diagnostic de vulnérabilité a également été développée avec le programme “Alpages sentinelles” dans les Ecrins.

 

L'ensemble du territoire hexagonal est cependant soumis à des évolutions globales (notamment l'augmentation de la fréquence et de l'intensité des aléas climatiques extrêmes) qui imposent d'adapter l'ensemble du système alimentaire afin de renforcer l’autonomie des élevages :

 

« Le climat change, la gestion de l’herbe aussi ». Source : Les chiffres clés des prairies et des parcours en France ; 2023 ; Idele

 

  • Le cycle des prairies tend à être plus précoce, avec une production plus importante au printemps, et plus tardive à l’automne ce qui représente une opportunité pour allonger la période de pâturage.
  • Le potentiel de production des prairies sera cependant réduit pendant l’été, des leviers ou des alternatives au pâturage estival doivent donc être mises en place pour compenser ce déficit.
  • Les cultures fourragères sont elles aussi soumises à des contraintes hydriques plus importantes durant l’été. Il est possible de raisonner les rotations et les itinéraires culturaux afin de sécuriser ces productions.

 

La gestion des prairies et des cultures fourragères peut donc être repensée en suivant via deux axes de réflexion principaux :

 

Optimiser l'utilisation des prairies et cultures fourragères

 

Ce premier axe d’action vise à construire les bases de systèmes fourragers et herbagers autonomes.

Tout d’abord, en maximisant la consommation d’herbe par le cheptel en période favorable à la production des prairies. En effet, le pâturage peut être la base de systèmes économes et autonomes à bas intrants et permettre une meilleure stabilité économique dans des conditions de forte variabilité économique et climatique interannuelle (Analyse N° 126 ; 2018 ; CEP du Ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire).

Les prairies délivrent de plus un nombre important de services écosystémiques, d’autant plus que leur état écologique est bon. L’importance d’entretenir les prairies temporaires ou naturelles est donc un enjeu primordial afin qu’elles soient plus robustes face aux aléas climatiques (Prairies temporaires et rotations ; 2018 ; Prairies Demain).

Les différents modes d’organisation du pâturage peuvent permettre d’optimiser plus ou moins l’utilisation de l’herbe, à la fois pour maximiser la production des prairies (maîtrise du cycle de l’herbe, gestion des refus, etc), et maximiser les bénéfices du pâturage pour l’animal (bien-être animal et accès à une ressource diversifiée, qualitative, et économe). C’est notamment le cas du pâturage tournant qui est de plus en plus démocratisé en pâturage de plaine.

 

Optimiser la gestion du pâturage

 

Ces systèmes doivent cependant s’adapter au creux de production estival des prairies qui impose souvent de distribuer des fourrages conservés en été. Cela peut passer par l’adaptation du calendrier de pâturage pour limiter l’utilisation des stocks aux autres saisons, via différentes pratiques :

 

Il est possible de faire pâturer les animaux tôt en saison, en favorisant une repousse homogène :    

Pratiquer le déprimage

 

En fin de saison, on peut plutôt chercher à valoriser une dernière repousse, ce qui permet aussi de limiter les refus :   

Pratiquer le topping

 

Dans la conduite tactique du pâturage, on peut également décider de réserver certaines parcelles pour la saison sèche : 

Pratiquer le report sur pied

 

Enfin, avec des hivers de plus en plus doux, la saison de pâturage peut aussi s’allonger vers l’hiver dans certaines régions :   

Faire pâturer en hiver

 

Le déploiement de ces leviers est cependant limité par l’accès à des surfaces pâturables en qualité et quantité suffisantes.

 

 

Les cultures fourragères sont également intéressantes en contexte de changement climatique, notamment parce qu’elles peuvent permettre de constituer des stocks fourragers afin de compenser les chutes saisonnières de production des prairies, et de produire un aliment avec une bonne valeur alimentaire (Les cultures fourragères, des solutions variées pour mieux faire face au changement climatique ; 2022 ; Produire bio).

 

Implanter des dérobées fourragères

 

Il est également possible de semer des prairies temporaires en même temps qu'un couvert destiné à être récolté, afin d'optimiser les cycles culturaux.

 

 Réaliser des semis de prairies sous couvert

 

 

Enfin, l'affouragement en vert est une pratique qui peut permettre à certaines exploitations de valoriser une herbe de complément lorsque le pâtuage n'est pas possible, et ainsi de limiter la consommation des stocks.

 

Réaliser un affouragement en vert

 

Sécuriser les ressources alimentaires

 Ce deuxième axe d’action vient renforcer les objectifs d’autonomie herbagère et fourragère.

 Tout d’abord, c’est la diversification des ressources qui peut venir sécuriser le système alimentaire. Cette diversification peut s’effectuer à l’échelle de la parcelle :

 

Intégrer des prairies multi-espèces à la rotation

 

Mais également à l’échelle de l’exploitation par la valorisation de ressources alternatives aux prairies et aux fourrages :

 

Pâturer des surfaces additionnelles et pastorales

 

Intégrer des ressources fourragères ligneuses

 

Utiliser des ressources alternatives pour l’alimentation et la litière

 

En polyculture-élevage, l’utilisation de cultures à double fin ou à double production représente un autre type de ressource alternative, qui permet de plus une certaine flexibilité tactique :

 

Intégrer des cultures à double fin ou à double production

 

Enfin, le stockage des ressources alimentaires sous différentes formes peut également permettre de faire face au potentiel déficit estival, et viendra donc sécuriser le système :

 

Constituer un stock de fourrage de sécurité

 

Réaliser un séchage du foin en grange

 

 

 

 

RESSOURCES TRANSVERSALES AUX TECHNIQUES DEPLOYABLES DANS CE LEVIER

 

Outils techniques et guides d’accompagnement

 

  • L’outil Autosysel permet d’accéder à des ressources sur l’autonomie alimentaire des élevages, et présente des stratégies de conduite du cheptel qui recoupent les choix techniques présentés ci-dessus.
  • Le guide n°3 du Casdar PraiCoS propose une méthodologie de conseil concernant la sécurisation de la production fourragère face aux aléas climatiques.

  • L’outil DIAM2 aide à la réalisation d’un diagnostic multifonctionnel du système fourrager pour les élevages de ruminants du Massif Central.

 

Outils d’animation et de co-construction de stratégies d’exploitation

 

  • Le jeu sérieux Lauracle « Levier d’AUtonomie pour Résister aux Aléas CLimatiquEs » : ce jeu-outil permet de discuter de l’intérêt de chaque pratique d’adaptation dans des contextes locaux.

  • Le jeu sérieux Rami Fourrager® aborde les trajectoires de transition des systèmes fourragers face à différents enjeux, dont l’adaptation au changement climatique. Il aborde aussi bien des leviers agronomiques que zootechniques.

  • L’escape game VerTige sur les prairies est destiné aux apprenant·es et groupes d’agriculteur·rices.

     

Ressources pédagogiques

 

L’Association Francophone pour les Prairies et Fourrages (AFPF) a produit plusieurs ressources pédagogiques en lien avec les prairies :

 

Pour en savoir plus sur l’ensemble des leviers et pratiques en lien avec l’adaptation en élevage

 

  • ACLIMEL est un espace de ressources géré par IDELE, dédié à l’anticipation et à la gestion des aléas climatiques en élevage. On peut notamment y retrouver la liste des travaux régionaux qui ont été réalisés sur la gestion des aléas climatiques en élevage.